• La lévrière afghane

    La lévrière afghaneEnfin, j’ai mon nouveau collier, il est magnifique à en tomber…
    J’ai eu un mal fou à en trouver un qui me plaise vraiment, qu’il soit beau et élégant, qu’il me mette en valeur, qu’il sublime ce petit rien de provoquant. Et il est là. En réalité, j’en ai trouvé deux, mais je ne parlerai que d’un.

    C’est celui que je mets presque au quotidien, l’autre ne peut se porter qu’en situation bien établie au risque de vraiment me valoir une très mauvaise réputation. Je n’aimerai pas avoir une très mauvaise réputation, juste que l’on m’en donne une, de réputation, une appropriée, une qui m’amuse, qui provoque, qui fait jaser les ménagères de plus ou moins de 50 ans.
    Chez le sexe opposé elle est déjà bien établie, très diversifiée selon les envies de chacun, jamais méchante et encore moins vulgaire mais terriblement troublante et attachée à de sulfureux surnoms commençant tous par un grand « C ».

    Il me fait plein de choses, cet anneau de cuir noir, strassé comme une parure de diamantaire, stylée comme un coupé sport. Je parade avec mon ornement canin, le menton légèrement levé, l’air de rien, le regard brillant de la mutine, un tout petit relèvement de la commissure des lèvres mi figue mi raisin quand je croise le regard de qui le remarque. Cet accessoire suscite bien des discours, bien des critiques et des voyages sulfureux dans les têtes en mal de désennuie. Ceux là je les remarque de suite, ils ne me sourient pas, ils regardent avec intensité, allant du collier au décolleté, se focalisant sur le soulèvement léger du voile noir qui couvre mes seins, j’accélère un peu le souffle, j’accentue le mouvement, je les remplie d’un peu plus d’opulence. Je m’amuse de leurs pupilles brillantes, de leur lippes humides, de ce qui nait déjà dans leur petite cervelle, eux ces hommes qui se disent maris fidèles, le bras ancré à celui de leur femelle qui d’un coup d’un seul, au moment de notre croisement, ne les fait plus bander. Et ces femelles qui en le voyant, ce trait de cuir noir luisant, ont les yeux qui s’arrondissent, entre stupeur et dégoût, colère et commisération, trouvant là matière à un affront à leur pseudo liberté maritale de femme bien comme il faut.

    Je ne suis donc pas une femme bien comme il faut… mais que suis-je donc. Si je suis le cheminement cérébral de la matrone, je suis déjà une garce (qui au passage n’est que le féminin de garçon, jusque là rien de bien surprenant), qu’elle assortira aussi du mot d’allumeuse. Là je ne suis pas du tout d’accord ; votre moitié d’orange n’a besoin de personne pour s’allumer comme une enseigne néon à Las Vegas. Vu le peu de cas que vous avez à alimenter son énergie positive tout au long de l’année, une simple étincelle d’électricité statique provoquée par le frôlement de mes bas, suffit à créer une illumination digne d’une aurore boréale.

    Suivra aussi peut être le mot putain, et là encore si on s’accorde qu’étymologiquement le mot vient de l’ancien français et plus particulièrement de l’adjectif "put" (sale), du verbe latin "putere" (puer) ou de "putidus" (fétide, puant) alors je proteste avec véhémence, je ne suis pas du tout d’accord que l’on me traite ainsi. Moi madame je ne pue pas, je sens bon partout, passant un temps fou quotidiennement à me caresser le corps entier avec des laits aux parfums enivrants, rendant la peau douce et soyeuse, pour que les yeux de votre bagué glisse sans modération d’une épaule à une autre, s’attardant entre temps sur des tétons qu’un rien anime.

    Mais si je porte un collier qui vient, lui, bien de l’animalerie, on pourrait bien entrevoir la possibilité que je ne fusse pas tout à fait humaine. Vu la taille du collier je ne puis être qu’un canidé, ce qui déjà me perturbe beaucoup vu que les chiens et moi, nous n’avons jamais eu beaucoup d’affinité. Je suis donc, à mes heures, une chienne… Warf.

    Je pose donc l’hypothèse que je suis une chienne avec un grand « C » (voilà donc dévoilé un des surnoms commençant par cette 3ème lettre de l’alphabet).

    Oui mais quelle race de chienne, j’ai beau me projeter, je ne m’imagine pas… Une caniche ? humm, non, je ne me vois pas du tout, debout sur mes petites pattes arrières, gigotant celles de devant pour avoir un sucre en fixant benoitement ce bipède qui se dit mon maître. Une Saint Bernard, massive, baveuse, poilue… non chassons cette idée stupide, comment un collier si raffinée pourrait aller à un animal, certes très sympathique voire utile, mais vraiment trop rustique pour me ressembler une seconde. Une levrette !!!! Ha mon diable, non, décidément non, laissons cette jolie position en dehors de tout cela, ce serait gâcher un plaisir que je place aux pinacles. Laissons aussi de côté tous ces petits chiens hideux, à poils courts ou longs, pouvant entrer dans un sac à main et qui ne servent absolument à rien, sauf peut être à faire parler d’eux quand la maîtresse porte le nom de son hôtel parental.

    Une lévrière afghane, voilà qui est déjà mieux. Le poil soyeux et bien ordonné, l’œil intelligent, les pattes longues comme perchée sur des stilettos, le bassin qui chaloupe avec volupté, le museau relevé, le nez au vent, la démarche altière. Je serai donc la chienne majuscule, ce trait d’union particulier entre mon moi de femme et mon moi de femelle toute canine.

    Voilà donc ce qu’il fallait démontrer, quand je porte mon joli collier, je vous donne des idées pas très catholiques. Elles vous assaillent n’importe où, qu’importe le lieu, le jour, l’heure. Votre chair est tendre et faible, mais votre imagination aiguisée. Quand Madame vous reparlera de l’affaire en public, vous admonestant d’un doigt inquisiteur à la table dominicale avec un « mais tu l’as bien regardé quand même cette bonne-femme avec son collier », vous nierez tout de bloc, organisant ma mise à mort à distance pour le bien être du reste de votre journée.

    Mais le soir venu, sous le drap, dans votre couche partagée avec la cruelle qui vous musèle, vous repenserez à cet animal racé, tellement femme mais si chienne, celui à qui il vous plairait tant de faire sentir pour une fois dans votre vie, que vous êtes de la race des mâles-maîtres. Votre esprit alors imaginera tout ce que vous aimeriez, provoquant la divine érection que vous ne voudrez partager, préférant la branlette rapide aux toilettes plutôt que de briser votre rêve en chevauchant votre monotone régulière.

    Rêvez de moi, monsieur du commun, parce que vous n’aurez rien…
    Une lévrière afghane ne s’offre pas aux derniers des humains !

     

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  • Commentaires

    1
    Le Marquis
    Jeudi 15 Mars 2012 à 22:47

    Ha enfin te voilà... il était temps, tu hibernais ???
    Tu es pardonné si tu viens me dire bonjour avec ce joli collier... non l'autre, j'aimerai savoir comment il est !
    Bel ange, vient de brûler les ailes à ma soirée, tu vas apprécier
    bise mordante 

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